Quand on parle d’enseignement en Belgique francophone, on parle d’emblée de réseaux.
Mots-clés associés à cet article : Enseignement , Non-discrimination , Égalité , École supérieure des arts , Égalité dans l’enseignement , Liberté de l’enseignement , Subvention
Eh oui, il existe différents réseaux – les réseaux officiels (de la Communauté française et des autres pouvoirs publics, principalement des communes et des provinces) et les réseaux « libres » (dont les établissements ont été créés par des particuliers ou des associations, la plupart liées à l’église catholique) et chacun d’eux possède son propre fonctionnement. Tous les enseignants sont pareillement payés par la Communauté et tous les réseaux reçoivent des subventions de fonctionnement. Celles-ci peuvent être différentes, par exemple quand il s’agit de l’entretien des bâtiments. Pourquoi ces différences ? Parce qu’en mai 1959, un grand accord, appelé « Pacte scolaire », en a ainsi décidé, tenant compte des réalités du terrain de l’époque. D’une certaine manière, un élève d’ici ne valait pas un élève de là.
Nous voici des dizaines d’années plus tard : cette différence de traitement des établissements d’enseignement se justifie-t-elle encore ?
Dans les écoles supérieures d’art
Aujourd’hui, les écoles supérieures d’art appartenant au réseau libre reçoivent, par étudiant, environ 40 % des subventions des écoles supérieures d’art organisées par la Communauté française. Cette différence de traitement peut-elle encore exister aujourd’hui ? La Cour d’appel de Liège a posé cette question – alors appelée « préjudicielle » - à la Cour constitutionnelle. Pour y répondre, la Cour constitutionnelle s’interroge : cette différence est-elle compatible avec l’article 24 (§ 1) de la Constitution qui garantit la liberté d’enseignement ? Avec ses articles 10 et 11, ainsi que son article 24, § 4, affirmant le principe d’égalité et de non-discrimination et n’interdisant pas des traitements différenciés basés sur des différences objectives et pertinentes ?
La liberté d’enseignement : oui mais…
Le Gouvernement de la Communauté française reconnaissait la différence de traitement, mais le considérait comme un héritage historique. Pour lui, aucune autre répartition des subventions octroyées à l’enseignement officiel n’était envisageable, seuls des moyens supplémentaires pourraient remédier à cette différence.
Dans son arrêt, la Cour affirme que la Constitution garantit bien la liberté d’enseignement, ce qui suppose que les pouvoirs organisateurs ne dépendant pas de l’enseignement organisé par la Communauté puissent, sous certaines conditions, bénéficier de subventions.
La Constitution, précise la Cour, affirme bien le principe d’égalité et de non-discrimination en matière d’enseignement mais elle n’interdit pas des traitements différenciés s’ils sont basés sur des différences objectives et pertinentes.
Pour la Cour, la question posée était donc : « la différence de traitement est-elle ou non justifiée par des différences objectives et pertinentes ? »
Des différences objectives et pertinentes ?
Dans son arrêt, la Cour constitutionnelle ne prend pas en compte les justifications de la Communauté française concernant la différence de traitement et l’importance de cette différence. Elle estime que les possibilités de financement des Écoles supérieures d’art libres subventionnées, autres que les subventions, ne justifient pas une différence de traitement aussi importante. Elle souligne que les droits d’inscription sont les plus bas possible pour toutes les Écoles supérieures d’art, qu’elles soient libres ou dépendantes de la Communauté.
Le 1er juillet 2021, la Cour conclut que l’octroi de frais différents aux Écoles supérieures d’art des réseaux officiel et libre n’est pas raisonnablement justifié. En conséquence, ce système viole les articles 10, 11 et 24 de la Constitution.
Attention : cet unique arrêt ne concerne que les Écoles supérieures d’art. Il n’annule donc aucunement les différences de subventions reçues par tous les établissements scolaires. Toutes les Écoles supérieures d’art se valent maintenant mais cela ne permet pas de généraliser et de dire que tous les établissements d’enseignement se valent !
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