« J’aime le contact avec les étudiants, j’aime leur montrer que le droit n’est pas aussi ardu qu’ils l’imaginent, qu’il a sa place dans la vie courante et que l’on peut en avoir besoin tout le temps. Je veux leur rendre accessible une matière qui leur parait figée, formelle et… pas intéressante ! »
Mélanie Penelle, juriste, est professeur de droit pour de futurs éducateurs spécialisés en accompagnement psycho-éducatif, de futurs professeurs qui devront donner un cours de droit dans l’enseignement secondaire et de futurs conseillers conjugaux, étudiants en promotion sociale. Questions-justice l’a rencontrée et lui a demandé de raconter comment elle travaille…
Elle explique commencer son enseignement par des cours plutôt généraux sur le fonctionnement de la Belgique et de la justice. Viennent ensuite des cours spécifiques sur le droit familial (autorité parentale, divorce, séparation, etc.), le contrat de mariage ou celui du travail, la responsabilité civile, etc. L’importance donnée à chaque matière est fonction de la future vie professionnelle des étudiants.
Le droit dans la vie quotidienne
L’enseignante détaille : « J’utilise souvent l’actualité comme porte d’entrée, pour accrocher les étudiants. Partir d’évènements actuels leur permet de se rendre compte que le droit n’est pas juste de la théorie pour de la théorie, mais que cela a du sens, qu’on en a besoin. Ou, après avoir commencé par la théorie, je l’illustre de faits concrets tirés de l’actualité. Par exemple, je peux partir d’un procès en cours d’assises pour expliquer la différence entre droits pénaux et civils ». Étant donné la future pratique des éducateurs ou conseillers conjugaux, Mélanie Penelle enseigne prioritairement des matières civiles.
Les étudiants se sentent-ils alors concernés par ces cours de droit ? Mélanie est très claire : « Les jeunes sont intéressés si l’on va au-delà de la théorie, donc si l’on est très concret. À priori, ils ne viennent pas chercher du droit ; donc, quand ils apprennent qu’ils auront un cours de droit, ils s’imaginent qu’il va falloir étudier par cœur. J’explique donc qu’il y a bien des règles de droit mais aussi une réflexion nécessaire. On doit appliquer ces règles, comprendre à quoi elles servent et donc se rendre compte qu’il y a du droit partout. Comme professionnels, ils seront devant des situations où ils devront s’interroger : quelle est la règle ? Et comment moi je la mets en œuvre dans ce cas pratique ? En fait, ils vont utiliser le droit non comme un professionnel du droit mais pour comprendre une situation, avoir le bon réflexe et, si besoin, envoyer vers un professionnel ».
Notre interlocutrice cite l’exemple d’un éducateur face à un enfant placé par un juge parce qu’il est mis en danger par ses parents. Ce professionnel, pour comprendre la situation et pouvoir aider ce jeune, doit connaître les droits des uns et des autres, donc qu’est-ce que l’autorité et la responsabilité parentales, que dit le droit à propos de la protection de la jeunesse, etc. ?
Autre exemple : si, face à une jeune qui lui dit vouloir avorter, un éducateur ignore que la loi ne permet un avortement qu’avant douze semaines de grossesse, il va peut-être lui dire qu’elle a le temps de réfléchir alors que ce n’est plus le cas. Un autre éducateur risque de donner de faux espoirs à un résident d’un home qui décide une euthanasie, mais n’est pas du tout dans les conditions légales qui la permettent.
Informer
La juriste rend donc ses étudiants conscients du besoin d’être informés dans leur vie professionnelle. Mieux, elle leur donne les outils permettant de trouver ces informations, qu’il faut aussi perpétuellement mettre à jour.
Elle leur conseille de consulter des sites de confiances, des sources officielles comme le site du SPF Justice, ou du SPF Emploi. Elle leur propose notre site www.questions-justice.be (qu’elle connait bien !) quand il s’agit du fonctionnement de la justice. Ce dernier aide surtout les futurs professeurs de droit, pas nécessairement juristes, qui vont pouvoir par exemple illustrer leur cours avec les interviews des différents juges (dans « Les rouages de la justice ») ou illustrer la théorie avec certains articles (dans « L’actualité commentée »). Toujours sur Questions-justice.be, ces futurs professeurs pourront aussi consulter la « Salle des profs », qui leur propose des outils, à utiliser tels quels dans le cadre de leurs cours ou dont ils peuvent s’inspirer en fonction de leur public, du nombre d’élèves aux cours, etc.
Facile, ce cours ?
Lorsqu’on lui demande ce qui est compliqué dans sa vie de professeur de droit, Mélanie Penelle n’hésite pas : c’est l’attitude des étudiants, qui n’ont pas tous l’envie d’apprendre alors même qu’ils ont choisi cette formation : « Il y a des touristes et il faut encore être plus imaginatif pour les accrocher ! Il faut parfois réfléchir davantage à la pédagogie qu’au contenu ! Le contenu, on le maitrise mais il faut parfois vraiment chercher comment et que faire pour faire passer le message ! »
Autre remarque : « Il faut aussi, surtout chez les futurs éducateurs, recadrer : ils veulent, par exemple, mener des débats, sur l’euthanasie, l’avortement, etc. Donc à moi de réagir : « Le cours de droit doit apprendre ce que dit la loi. Que vous soyez pour ou contre l’euthanasie, la loi est là. En tant que professionnel, vous allez devoir accompagner la personne qui vous en parle, peu importe votre opinion.
En fin d’entretien enfin, l’enseignante souligne l’importance de préparer ses cours, d’avoir de bons outils et de se tenir à jour en permanence via des formations, des sites de confiance.
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