En juin 1979, F.H. assassine cinq membres d’une même famille. Auparavant, en février, il a également tué une autre personne.
Arrêté, il est condamné à la peine de mort. Celle-ci n’existant plus en Belgique, elle est transformée en prison à perpétuité.
Aujourd’hui, en avril 2025, F.H. demande l’euthanasie.
Que s’est-il passé depuis 1979 ?
Mots-clés associés à cet article : Prison , Tribunal de l’application des peines (TAP) , Euthanasie , Détenu , Libération conditionnelle , Prisonnier , Détention limitée

Depuis avril 1993, F.H. est dans les conditions pour bénéficier d’une détention limitée (dans ce cas, le détenu sort le matin, par exemple pour une formation, et rentre le soir à la prison) ou d’une surveillance électronique et, depuis septembre 1993, d’une libération conditionnelle. Cela signifie qu’il peut en demander l’application ; cela ne signifie pas que ses demandes seront automatiquement acceptées.
De multiples demandes
De 1993 à 2007, F.H. a fait plusieurs demandes de libération conditionnelle. Toutes ont été rejetées par la Commission de libération conditionnelle (aujourd’hui remplacée par le Tribunal de l’application des peines).
Le 1er avril 2007, à la suite d’un avis défavorable de la direction de la prison, le Tribunal de l’application des peines de Gand a de nouveau rejeté la demande de libération conditionnelle « en raison de l’imprévisibilité du comportement du requérant et de la nécessité de présenter un plan de réinsertion complet ».
En novembre 2007, F.H. a fait une demande de détention limitée. Un plan de réinsertion est proposé mais le Tribunal de l’application des peines l’a rejeté vu que « le risque de perpétration de nouvelles infractions graves ne pouvait être contrecarré par le plan de réinsertion proposé, même en imposant au requérant des conditions particulières individualisées ».
Pas de garanties suffisantes
S’en suivront régulièrement de nouvelles demandes de libération conditionnelle, de détention limitée ou de surveillance électronique (2008, 2009, 2010, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016, 2018…). Toutes seront rejetées par le Tribunal de l’application des peines après de nombreuses enquêtes et de multiples rapports d’experts, médicaux et autres. En 2013, par exemple, le Tribunal de l’application des peines a justifié son refus en précisant que « le plan de réinsertion proposé par le requérant ne présentait pas les garanties nécessaires pour limiter le risque de perpétration de nouvelles infractions en cas de confrontation à une situation lui causant de la frustration ».
Lors d’autres nouvelles demandes de détention limitée ou/et de surveillance électronique, le Tribunal de l’application des peines a précisé que « l’intérêt de la société devait primer l’intérêt individuel de réinsertion, eu égard au risque de perpétration de nouvelles infractions graves. Or, a dit encore le Tribunal de l’application des peines, les experts sont d’accord sur l’imprévisibilité du comportement de F.H.
Une solution intermédiaire inapplicable
En 2017, un collège d’experts propose une solution intermédiaire : « un séjour dans une unité de psychiatrie légale qui permettrait parfaitement de pallier les risques ». Mais cette solution est impossible à concrétiser parce que les unités de psychiatrie légale n’acceptent que des personnes internées et pas des personnes emprisonnées.
F.H. continuera à introduire des demandes. Il s’adressera aussi à la Cour de cassation, faisant valoir que, s’il devait être admis dans une unité de psychiatrie légale pour être libéré alors que ces unités ne pouvaient l’accepter, cela signifie qu’il ne sera jamais libéré. Mais en 2020, la Cour de cassation donne finalement raison au Tribunal de l’application des peines.
F.H. s’adresse ensuite à la Cour européenne des droits de l’homme. Le 9 mai 2023, celle-ci condamne la Belgique pour « peine inhumaine et dégradante », vu l’absence de perspective de libération. Elle estime que la Belgique viole l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Aujourd’hui
En avril 2025, F.H. est cependant toujours en prison, toutes ses demandes ont continué à être refusées.
Aujourd’hui, emprisonné depuis 45 ans, il demande l’euthanasie. Il explique ressentir « des souffrances psychologiques insupportables » vu l’absence d’une perspective de libération.
Rappelons que la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie demande que trois conditions essentielles soient réunies :
- la personne concernée doit formuler une demande volontaire, répétée et réfléchie ;
- cette personne doit subir des souffrances physiques ou psychiques insupportables et impossibles à apaiser ;
- ces souffrances doivent être provoquées par une maladie incurable.
Rappelons aussi qu’un prisonnier bénéficie de tous les droits d’un citoyen. Il est seulement privé de liberté.
La ministre de la Justice, qui n’a aucune compétence concernant une demande d’euthanasie, souligne déjà l’importance et la difficulté de trouver un équilibre entre une détention humaine, la sécurité de la société et le respect des victimes. Ainsi que nous l’a précisé Jacqueline Herremans, présidente de l’association pour le droit de mourir dans la dignité (A.D.M.D), si la ministre examine le dossier, ce ne peut être interprété que comme visant à examiner la situation du prisonnier F.H., ses conditions d’emprisonnement et ses demandes de libération conditionnelle (dans le respect des compétences du tribunal de l’application des peines). Ce ne pourrait être pour se prononcer sur la demande d’euthanasie.
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