Dans un précédent article, Questions-Justice a expliqué à quoi servent les huissiers de justice. Voici maintenant quelques mots pour montrer comment l’on devient huissier et comment ce métier se pratique concrètement.
Mots-clés associés à cet article : Huissier de justice , Conciliation , Saisie , Preuve , Discipline , Procédure , Exécution des décisions de justice , Chambre nationale des huissiers de justice
Actuellement, la Belgique compte 610 huissiers de justice. Qui sont-ils ? Ces hommes et ces femmes sont devenus huissiers de justice à l’issue d’une longue formation. Jugez-en !
Des années de formation
- Au départ, il faut avoir un master en droit et choisir ensuite ce métier au lieu d’envisager notamment celui d’avocat, de notaire, de magistrat ou de juriste d’entreprise.
- Un stage de deux ans chez un huissier donne alors un certificat de fin de stage.
- Ce certificat permet de présenter un concours – écrit et oral - pour devenir candidat huissier de justice. Ce concours est organisé par la Commission de nomination, une institution dépendant de la Chambre nationale des huissiers de justice.
- La réussite de ce concours (de 30 à 50 % des candidats) permet d’être nommé par arrêté royal et de remplacer un huissier de justice à titre temporaire pendant trois ans.
- Ensuite, quand une place se libère, le candidat huissier de justice peut y postuler et passer un nouveau concours. Un classement des candidats est réalisé par la Commission de nomination et trois noms sont envoyés au ministre de la justice. Le premier candidat est généralement nommé, par arrêté royal.
Choisir ce métier ?
La question nous brûlait les lèvres et nous l’avons posée à Quentin Debray, président francophone de la Chambre nationale des huissiers de justice : pourquoi devient-on huissier de justice ? « Je parle de moi bien sûr, précise clairement notre interlocuteur, qui poursuit : mon père est huissier de justice et j’ai fait des jobs d’étudiant dans son étude. J’ai pris goût au métier. C’est peut-être une caricature mais elle est valable pour moi : être avocat ne m’attire pas, j’aurais un sentiment d’injustice si je défendais quelqu’un en sachant que sa position n’est pas juste. Qu’il gagne me poserait vraiment un problème personnel.
Quant à la magistrature, c’est aussi un positionnement personnel, mais je n’aime pas émettre des jugements, je ne me sentirais pas très à l’aide de devoir prendre des positions, de donner raison à l’un et tort à l’autre même si je sais très bien que les situations ne sont jamais blanches et noires.
J’aime le positionnement de l’huissier parce que je ne juge pas les gens. Je ne suis pas non plus le plaideur du requérant, celui-ci n’est pas mon client, je ne lui dois rien, j’exécute la mission de service public que m’a déléguée l’État. Je vérifie si le requérant a le droit de me demander ce qu’il me demande et, si ce droit est reconnu, j’ai l’obligation de donner suite à sa demande.
Envisager les choses de cette manière me permet d’avoir la main tendue vis-à-vis de la partie débitrice : la décision doit être exécutée mais je m’adapterai en fonction des personnes, des situations pour trouver une solution avec elles. Quitte même à les informer – ce que me reprochent parfois des requérants (c’est-à-dire ceux qui me demandent de faire exécuter un jugement – contre les droits de la partie adverse. Par exemple, je peux informer sur la possibilité d’un appel, diriger ces personnes vers un avocat ou un bureau d’assistance juridique. Il s’agit que les droits des uns et des autres soient respectés ».
Face à des situations difficiles
Parmi les missions dévolues à un huissier de justice, deux sont particulièrement délicates, les expulsions et les enlèvements de mobilier. Comment l’huissier se comporte-t-il dans ces situations-là ? Quentin Debray est catégorique : « J’avertis préalablement les CPAS et, dans les cas difficiles, je fais pression sur eux pour qu’ils interviennent directement. Il arrive qu’on doive expulser des femmes avec des enfants en bas âge. C’est rare, c’est difficile à vivre mais, le soir, quand je me regarde dans mon miroir, j’ai la fierté d’avoir fait mon boulot correctement. J’ai le sentiment d’avoir fait ce qu’il fallait et les gens qui devaient être aidés l’ont été par le CPAS. Je n’ai pas quitté l’endroit avant que ce soit le cas. Vous savez, mon métier est difficile mais on peut le faire correctement, dans le respect des gens, avec énormément d’empathie… ».
Pensant à l’image souvent négative des huissiers de justice dans la population, difficile de ne pas poser une dernière question : « Tous les huissiers font-ils preuve de cette indispensable empathie ? ». Notre interlocuteur sourit : « Je ne peux pas le certifier ! Comme dans toutes les professions, pensez aux médecins par exemple, certains sont plus empathiques que d’autres… ».
Des organisations professionnelles
Comme d’autres professions libérales, les huissiers de justice possèdent une Chambre nationale (des huissiers de justice). Celle-ci est l’organe de contrôle de la profession, l’organe disciplinaire, c’est également celui qui fixe les règles.
Une Chambre d’arrondissement fait en sorte que les choses se passent bien dans l’arrondissement, « c’est un outil local qui permet d’huiler les processus ».
Citons encore l’Union francophone des huissiers de justice, la Conferentie van de Vlaamse Gerechtsdeurwaarders ou encore l’Association des candidats huissiers de justice, trois syndicats, donc un regroupement des huissiers pour défendre leurs intérêts, leur profession. Ces organismes apportent un réel soutien à ceux qui pratiquent ce métidr d’huissier de justice, par exemple via une formation permanente, une préparation aux examens ou une revue.
Une dernière info : quels paiements ?
Chaque démarche d’un huissier de justice est tarifée depuis 1976. S’il y a procès, le code judiciaire prévoit que les frais d’exécution (donc également ceux dus à un huissier) sont à charge du perdant.
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