L’actualité commentée

Octobre 2016

Neuf ans de prison pour la destruction de monuments historiques

Le 12 octobre 2016

Outre les génocides et les crimes contre l’humanité, la Cour pénale internationale juge les crimes de guerre

Mots-clés associés à cet article : Cour pénale internationale (CPI) , Bien culturel , Culture , Crime de guerre , Unesco

On pourrait brièvement définir cette dernière notion comme comprenant des actes aussi graves que, par exemple, l’homicide, la torture, le pillage, la prise d’otage, etc., dans le contexte d’une guerre mais aussi, dans le même contexte, « le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la religion, à l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments historiques [...] » (article 8, § 2, e), iv), du Statut de Rome du 17 juillet 1998, qui est le traité international ayant créé la Cour pénale internationale)

C’est sur la base de cette dernière accusation que, le 27 septembre 2016, la Cour a condamné Ahmad Al Faqi Al Mahdi à neuf ans de prison pour la destruction des mausolées de Tombouctou. C’est la première fois qu’elle condamne un individu pour la destruction de « biens culturels ». Elle considère donc que détruire ceux-ci est aussi un crime de guerre. Jusqu’à présent, la Cour pénale internationale avait jugé des personnes accusées de pareils crimes pour des actes comme le meurtre, le viol, l’esclavage, la déportation, etc.

Tombouctou 2012

En 2012, les djihadistes des mouvements Ansar Dine et Al Qaida au Maghreb islamique occupent Tombouctou, une très vieille ville du nord du Mali. Ils imposent la terreur en soumettant la population à la charia c’est-à-dire à un ensemble de lois islamiques très strictes régissant la vie religieuse, politique et sociale.

En juin et juillet, Al Mahdi et d’autres personnes détruisent dix monuments, dix mausolées fort importants de Tombouctou. Ces mausolées sont historiques et religieux. Ils contiennent des « saints musulmans », des « personnages » admirés et respectés par les habitants qui les considèrent comme des protecteurs de la ville. Ils témoignent du passé de Tombouctou, qui fut un grand centre à la fois religieux, culturel et commercial. L’UNESCO (organisation mondiale pour l’éducation, les sciences et la culture) a classé ces mausolées au patrimoine mondial de l’humanité en leur reconnaissant une valeur exceptionnelle. Le patrimoine mondial de l’humanité est en quelque sorte l’héritage commun de tous les humains.

Pour les djihadistes, ces monuments sont incompatibles avec leur manière de vivre leur religion, l’islam. Ils veulent montrer qu’ils contrôlent la ville, qu’ils ont le pouvoir et qu’ils font « table rase » du passé, seules leurs croyances ayant de la valeur pour eux. Ils détruisent alors les mausolées.

Un « bien culturel » ?

Ces monuments sont donc des « biens culturels » mais voyons ce que cela signifie.
La culture d’un peuple, c’est une manière de vivre qui lui est propre. Un bien culturel, ce peut être un monument, un tableau, une langue ou encore une peinture, une musique, une cuisine, une coutume, bref un ensemble de manières de vivre qui font qu’un peuple est ce qu’il est, qui lui donnent une identité particulière. S’attaquer à ces biens culturels, c’est attaquer un peuple et vouloir le détruire.

C’est aujourd’hui reconnu par la Cour pénale internationale comme un crime de guerre. Puisqu’Al Mahdi est condamné à neuf ans de prison.

Il n’a pas été condamné plus sévèrement parce que la Cour lui a reconnu des circonstances atténuantes : il reconnait qu’il est coupable et a coopéré avec la justice, il exprime des regrets et il s’est correctement comporté pendant son emprisonnement.

D’autre part, lorsque le chef d’Ansar Dine a décidé de détruire les mausolées, Al Madhi pensait qu’il valait mieux ne pas les détruire.

La condamnation d’Al Mahdi pour destruction de biens culturels est très importante. Elle est « une étape historique dans la reconnaissance de l’importance du patrimoine pour les communautés qui l’ont préservé au fil des siècles et au-delà, pour l’humanité tout entière », a conclu Irina Bokova, directrice générale de l’UNESCO.

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