Les prisons belges sont surpeuplées depuis bien des années et cela provoque de nombreux problèmes pour les prisonniers comme pour le personnel. La Belgique est d’ailleurs régulièrement condamnée à ce sujet par la Cour européenne des droits de l’homme.
Mots-clés associés à cet article : Prison , Observatoire international des prisons , Surpopulation carcérale
Mais pourquoi cette surpopulation ? Trois raisons principales l’expliquent.
En prison avant d’être jugé
Première raison de la surpopulation : le nombre de personnes en détention préventive. Selon le rapport de l’Observatoire international des prisons, celles-ci représentent 30 à 35 % de la population pénitentiaire. Des personnes accusées d’une infraction sont parfois emprisonnées avant d’être jugées. On dit qu’elles sont « en détention préventive ».
Cela ne peut être le cas que quand différentes conditions sont réunies. En effet, un juge d’instruction ne peut placer un inculpé en « détention préventive » que s’il estime celui-ci dangereux pour la société ou capable de fuir. Autres raisons : il s’agit d’éviter que des informations importantes pour l’enquête disparaissent ou que l’inculpé puisse être en contact avec des complices.
Parmi les inculpés, on retrouve des personnes qui ne possèdent pas de titre de séjour et qui donc, légalement, ne peuvent pas rester en Belgique. Même pour une infraction peu importante, elles sont systématiquement placées en détention.
En Belgique, les inculpés en détention préventive sont aussi nombreux parce que, même s’ils peuvent libérer ces prisonniers à tout moment (par exemple quand les informations utiles sont en leur possession), les juges d’instruction le font rarement.
En théorie, un bracelet électronique
Le port du bracelet électronique pourrait aussi permettre de diminuer la surpopulation. Un inculpé peut en effet être placé en surveillance électronique plutôt qu’arrêté et emprisonné mais les juges ne prennent pas souvent cette décision. D’autre part, pour pouvoir porter un bracelet électronique, cet inculpé doit avoir un domicile et une ligne téléphonique, ce qui n’est pas le cas de tout le monde. Les personnes sans domicile fixe, par exemple, en sont exclues. Par ailleurs, vivre avec un bracelet électronique est très difficile pour une personne inculpée parce qu’elle ne peut sortir de son domicile (contrairement à un condamné qui doit, lui, respecter un horaire strict mais permettant une formation, un travail…).
Des peines plus longues
Selon les recherches des criminologues, les peines prononcées par les cours et tribunaux sont plus longues qu’auparavant. C’est particulièrement le cas des peines de plus de cinq ans. De nombreux criminologues considèrent aussi que la criminalité n’est, elle, pas plus importante qu’auparavant.
Les condamnations sont donc de plus en plus sévères. Pourquoi ? Parce que, dans notre société, nombreux sont ceux qui croient qu’une peine plus lourde fera réfléchir les individus qui voudraient commettre une infraction. À leurs yeux, plus la peine sera longue, plus elle aura un effet dissuasif. Selon les études réalisées à ce sujet, ce n’est pas exact : au moment de passer à l’acte, une personne ne tient pas compte de la longueur de peine qu’elle pourrait encaisser.
Plus grave encore : ces longues peines isolent davantage le détenu de ses proches et de la société.
Trop peu de libérations conditionnelles
Après avoir purgé un tiers ou la moitié de sa peine, un détenu peut demander une libération conditionnelle. Celle-ci n’est cependant pas automatique, certaines conditions doivent être réunies.
Un dossier important doit être élaboré par le détenu, avec l’aide du service psychosocial de la prison. Il doit comporter tout un programme de réinsertion : domicile, situation administrative en ordre, emploi ou formation, suivi psychologique ou/et social, etc.
D’une part, ces conditions sont difficiles à remplir. D’autre part, les services psychosociaux sont souvent débordés et manquent de personnel.
Cela signifie, concrètement, que le détenu ne pourra souvent pas remplir son dossier dans un temps qui lui permettrait réellement d’obtenir sa libération conditionnelle quand il peut légalement y prétendre. En effet, le tribunal de l’application des peines qui octroie cette libération conditionnelle, se base sur ces rapports.
Autre motif expliquant les libérations conditionnelles tardives : les tribunaux de l’application des peines considèrent souvent qu’une surveillance électronique doit intervenir avant une libération conditionnelle. Celle-ci n’est généralement accordée qu’après des congés pénitentiaires qui, eux, sont octroyés par l’administration pénitentiaire. Et l’administration pénitentiaire les accorde rarement dès la première demande. Au total, la procédure de libération conditionnelle est donc de plus en plus longue.
Refus de grâces, afflux d’internés
D’autres pratiques jouent également un rôle dans la surpopulation. Par exemple, les recours en grâces collectives et individuelles sont pratiquement toujours refusés. Et enfin, une dernière catégorie de détenus est elle aussi en augmentation : les internés étaient 640 en 2000 et 860 au début 2016.
Un témoignage, parmi d’autres souvent plus durs, explique la difficulté de la surpopulation pour les prisonniers :
« Nous sommes trois dans une cellule de trois mètres sur quatre. Il y a deux lits superposés, une grande armoire. Le dernier arrivé n’a pas de place dans cette armoire, il doit mettre ses affaires dans une grande caisse en carton qu’il range sous la planchette murale, mais qu’il faut glisser sous la table quand il déplie son matelas. À ce moment, plus moyen de mettre les pieds sous la table. Dans la cellule, si un d’entre nous veut se dégourdir les jambes, un autre regarder la TV et le troisième essayer d’écrire […], nous sommes toujours à contretemps ».
Source : Rapport 2014-2016 de l’Observatoire international des prisons. www.oipbelgique.be
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