L’actualité commentée

Avril 2023

Les « fouilles à nu » avec génuflexion des accusés du procès des attentats

La Cour d’appel confirme l’interdiction en la renforçant

Le 17 avril 2023

Que dit maintenant la justice au sujet de la pratique des fouilles à nu imposées aux accusés des attentats terroristes de Bruxelles ? Que s’est-il passé depuis le jugement en référé du 29 décembre 2022 que nous avons expliqué dans un article publié le 3 février 2023 ?

La décision en première instance

Rappelons que l’État belge a été condamné par ce juge à cesser immédiatement la fouille au corps avec génuflexion quotidienne et systématique. Cette fouille ne pouvait être automatique ou systématique mais devait être justifiée par une impérieuse nécessité de sécurité. Le juge des référés considérait qu’il s’agissait là d’un traitement dégradant qui, dans ces conditions, violait la Convention européenne des droits de l’homme.

Les suites de cette décision

Le 2 janvier 2023, le Ministre de la Justice a adopté la directive ‘relative au transfèrement par la Police fédérale des intimés dans le cadre du procès d’assises sur les attentats terroristes du 22 mars 2016’ : les fouilles se déroulent dorénavant en deux phases, visant le haut puis le bas du corps.
Il s’agissait d’une première mesure d’adaptation suivant l’ordonnance du juge des référés mais cette directive du ministre ne fait aucunement référence aux génuflexions.

L’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles et les fouilles à nu avec génuflexions

L’État belge a fait appel, estimant que ces « fouilles à nu » avec génuflexion étaient admissibles.
Comme ils en ont le droit, les accusés du procès d’assises ont fait de même, estimant que la loi n’autorise pas ces fouilles, spécialement lorsqu’elles sont accompagnées de génuflexions, comme tel était le cas.
Le 13 mars 2023, la Cour d’appel a tranché la question en allant dans le sens de ce que demandaient les accusés.
Elle a examiné plusieurs textes de loi qui auraient été susceptibles d’être appliquées pour justifier les fouilles en question mais elle a jugé qu’aucun de ces textes ne permettait cette importante limitation du droit au respect de la vie privée des intéressés. Toujours selon la Cour, il faudrait un texte de loi suffisamment clair pour rendre la chose éventuellement possible en fonction des circonstances. Or, pareil texte clair n’existe pas.
Pour prendre un exemple, il existe, il est vrai, un article de la loi ‘sur la fonction de police’ qui évoque « fouille à corps » mais il y est seulement indiqué que celui qui est soumis à pareille fouille peut être invité – ou contraint – à se déshabiller complètement afin que ses habits puissent être examinés sans qu’il y soit question de génuflexion.
La Cour estime donc que les génuflexions sont illégales et doivent immédiatement cesser.

Autres questions jugées par la Cour d’appel

Elle conclut encore que, vu le nombre de policiers, le port des menottes et du gilet pare-balles lors des transferts des détenus de leur cellule jusqu’à la salle d’audience, le port de lunettes occultantes est déraisonnable et ne se justifie donc aucunement, sauf au cours du trajet dans les véhicules mais uniquement pour cette portion du déplacement.

Les suites de l’arrêt : les astreintes

La Cour d’appel ordonne donc bien à l’État belge d’arrêter immédiatement ces pratiques illégales.
Comme le juge des référés l’avait déjà décidé, elle prévoit une astreinte de mille euros par détenu et par jour, avec toutefois un maximum de 25.000 euros par accusé, si les comportements illégaux ne s’arrêtent pas. C’est là une manière d’obliger l’État à respecter ces nouvelles décisions.
Questions-Justice reviendra dans un prochain article sur la manière dont les accusés pourraient bénéficier effectivement de ces astreintes au cas où l’État belge devait ne pas respecter les interdictions contenues dans l’arrêt de la Cour d’appel.

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