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L’Ukraine et la Cour pénale internationale

Vers la ratification

Le 10 octobre 2024

La Cour pénale internationale (CPI) peut juger quatre crimes : les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les crimes de génocide et les crimes d’agression.
Elle a été créée le 1er juillet 2002 lorsqu’un traité, signé le 17 juillet 1998 et appelé « Statut de Rome », est entré en vigueur. Ce traité a été ratifié – autrement dit approuvé – par 124 États mais pas par d’autres comme notamment les États-Unis, la Russie et la Chine.
La Cour peut intervenir si l’auteur présumé du crime appartient à un État ayant ratifié ce traité ou si les faits à juger se sont passés sur le territoire d’un de ces États.

Photo @ PxHere

Jusqu’à présent

Jusqu’il y a peu, l’Ukraine n’avait pas encore ratifié le Statut de Rome sur la CPI mais, le 9 avril 2014, elle a reconnu la compétence de la Cour pour les crimes de guerre et contre l’humanité commis chez elle du 21 novembre 2013 au 22 février 2014.
En septembre 2015 ensuite, elle a reconnu ces mêmes compétences pour l’ensemble de ces mêmes crimes commis à partir du 20 février 2014.
L’Ukraine n’a donc pas « ratifié » le traité, mais seulement permis à la Cour pénale internationale de poursuivre les auteurs de crime commis sur son territoire.
La Cour a donc pu lancer une enquête concernant les crimes de guerre et crimes contre l’humanité qui auraient pu être commis en Ukraine depuis 2013.
Cette enquête a permis d’émettre des mandats d’arrêt pour six personnes, dont Vladimir Poutine.

Maintenant et plus tard…

L’Ukraine souhaite maintenant devenir le 125e État membre de la CPI. Dans ce but, le 15 août 2024, un projet de loi ratifiant le Statut de Rome a été voté par le parlement ukrainien. C’est une première étape importante pour que l’Ukraine devienne effectivement membre de la Cour pénale internationale. En effet, pour qu’elle devienne ce 125e membre, d’autres étapes doivent suivre, par exemple le dépôt d’un « instrument de ratification » auprès du Secrétaire général des Nations-Unies.
Quand l’Ukraine sera effectivement membre de la CPI, celle-ci sera aussi compétente pour le crime de génocide et le crime d’agression. Ce n’était pas le cas auparavant, la CPI n’étant alors compétente que pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.
L’Ukraine sera alors obligée de coopérer avec la CPI. Elle pourra aussi participer à l’élection des juges et du procureur et voter le budget de la Cour.
De plus, le fait d’être un pays membre de la CPI est un élément positif pour l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne, où elle et candidate.

Un bémol

Il faut noter toutefois que, comme d’autres États avant elle, l’Ukraine, tout en ratifiant le Statut de Rome, a déclaré exclure la compétence de la Cour pénale internationale lorsque des crimes de guerre sont « probablement commis par ses ressortissants ».
Ce faisant, elle applique l’article 124 du Statut de Rome, qui lui permet de faire cela mais qui prévoit aussi la possibilité d’exclure la compétence de la Cour à l’égard des crimes de guerre commis sur son territoire. En appliquant la première exclusion mais pas cette dernière, l’Ukraine applique cet article 124 « à la carte ». On aura compris que cela vise à limiter les risques de poursuite à l’encontre des membres des forces armées ukrainiennes tout en assurant que les crimes de guerre commis par des soldats russes, par exemple, sur son territoire puissent faire l’objet de poursuites.
Il est vrai qu’un processus de suppression de cet article 124 est en cours mais ce n’est pas encore le cas.
Il reste aussi à voir si cette restriction n’est pas incompatible avec les déclarations ukrainiennes de 2014 et de 2015 dont il est question plus haut. La Cour sera peut-être amenée dans l’avenir à se prononcer sur ce point.

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